Occitan

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Racines (n.f. / littéraire): lien solide, attache profonde à un lieu, un milieu, un groupe.

Une journée d’été encore bercée par ce magnifique chant des cigales qui résonne en plein cœur des Corbières, fenêtres grandes ouvertes pour profiter au mieux de cet orchestre de plein air sous un terrible soleil de plomb. Les vignes de cinsaut, de grenache et de carignan bordent cette troisième départementale, traversant un à un les plus beaux villages de la région sous le regard figé des montagnes de calcaire de l’Alaric. Un véritable paysage de carte postale, chargé d’histoire et principalement teint aux couleurs vives des lavandes, genêts et asphodèles. L’horizon est masqué par de nombreuses collines peuplées d’oliviers et de pins parasol, dont certains des plus jeunes continuent de pousser à même les cendres d’anciens camarades tristement tombés sous le feu du précédent incendie. C’est ainsi que se décrit ma route languedocienne préférée, non loin de la ville où je suis né il y a trente-et-un ans déjà, non loin des paisibles berges du Canal du Midi et des remparts de la majestueuse Cité médiévale.

Ces images d’enfance et d’aujourd’hui m’accompagnent en permanence, quel que soit la valeur du signal GPS indiquant ma position présente, de mon poste de travail en plein cœur du Mile-End montréalais aux sommets enneigés de la silencieuse Vallée des Fantômes. Les images d’un immense château fortifié s’embrasant sous les feux d’artifices d’une fête nationale, un beau soir du mois de juillet. Les images de ces côtes pavées longeant les remparts d’un donjon rempli de touristes fraichement sortis d’un raid gastronomique à base de cassoulet carcassonnais, de liqueur Micheline et d’Or Kina. Les images de cette cours d’école primaire située au pied de la Cité, où l’on apprenait à lire, jouer du kini en récréation et placer notre pays sur une vaste carte du Monde. Le son de cet accent qui te dévisage en tant qu’enfant du Sud de la France, en vadrouille, loin de ses terres natales. Ton identité qui rejaillie de tes propres paroles.

Tu peux quitter l’enfance, l’enfance ne te quitte pas. La collection des épées et heaumes en plastique est au grenier depuis bien longtemps, remplacée par une belle photo entre ami(e)s en pleine session apéritive au pied des remparts. Ces routes que tu prenais en poussette, en vélo, en bus puis au volant de ta toute première voiture. Le temps passe mais les racines évidemment restent, et ce malgré les milliers de kilomètres qui aujourd’hui nous séparent. Et, finalement, une chose est certaine et restera gravée dans mon esprit: je ne voyage pas pour échapper à mes terres d’origine, mais pour me rendre compte que rien ne remplacera le berceau de mon enfance.